Les Espèces Exotiques Envahissantes (EEE) sont une préoccupation majeure pour la conservation de la nature au niveau mondial. Les coûts économiques associés à leurs dégâts ainsi qu'à leur gestion sont extrêmement importants. La détection précoce de leur présence sur un nouveau territoire est donc le fer de lance des politiques de limitation des impacts des EEE. Dans ce contexte, la mise en oeuvre de protocoles de surveillance basés sur l'analyse de l'ADNe est une piste prometteuse, qui permettrait à la fois une standardisation des méthodes et une réduction des coûts liés à ces suivis. Un large corpus de publications scientifiques met en évidence que l'analyse de l'ADN environnemental (ADNe) permet d'inventorier les communautés de poissons et de bivalves de manière plus efficace que les méthodes traditionnelles et d'améliorer la détection d'espèces rares (pouvant être menacées ou exotiques envahissantes). En utilisant des protocoles d'échantillonnage et d'analyse optimisés (grands volumes d'eau, plusieurs réplicats, prélèvements intégrateurs, etc.), il a notamment été démontré sur le Rhône qu'un échantillonnage ADNe permettait de détecter autant d'espèces de poissons qu'en 10 années de pêches à l'électricité. Pour les bivalves, les prélèvements ADNe permettent de détecter en moyenne 30% d'espèces en plus que les méthodes traditionnelles. Néanmoins, il n'y a à ce jour pas d'études qui visent à définir des protocoles d'échantillonnage optimaux pour des milieux aquatiques complexes (avec des régimes hydrologiques et des habitats très variés). Dans l'optique d'un déploiement d'un réseau de surveillance des EEE sur le territoire français, l'objectif de cette étude est d'évaluer la performance de différents protocoles de détection de la faune aquatique (poissons et bivalves) par l'ADNe, en cherchant à optimiser le rapport coût / efficacité sur plusieurs cours d'eau présentant des régimes hydrologiques complexes et des habitats variés. Dans ce but, deux hypothèses ont été testées : (i) le point aval est intégrateur des informations collectées dans les différents milieux en amont ; (ii) les différents prélèvements collectés le long d'un transect transversal sur une portion de cours d'eau fournissent une information homogène. Nous avons également exploré les stratégies d'échantillonnage qui semblent les plus pertinentes (volumes, nombre et localisation des prélèvements) pour la mise en place d'un réseau de surveillance des EEE. Les EEE étant supposées être présentes en très faible effectif au départ d'une invasion, l'objectif de l'étude était d'évaluer les capacités de la méthode ADNe à détecter des espèces « rares ». Néanmoins, en l'absence d'informations sur les espèces qui pouvaient être considérées comme « rares » sur chacun des sites étudiés (pas d'inventaires traditionnels menés en parallèle des échantillonnages ADNe), l'étude s'est focalisée sur la performance des différentes stratégies d'échantillonnage testées à détecter l'intégralité de la biodiversité inventoriée sur le site par ADNe. Huit sites d'étude ont été sélectionnés sur des grands cours d'eau français (Seine, Ain, Oise, Charente, Somme et Loire) caractérisés par des régimes hydrologiques complexes et des habitats variés (bras principal, bras secondaires, annexes hydrauliques, etc.). Des comparaisons du nombre d'espèces détectées ont été effectuées (i) entre les différents bras/annexes et le point supposé intégrateur (restitution) et (ii) entre les prélèvements le long d'un transect transversal (rive gauche, centre, rive droite). Les principales conclusions de cette étude sont les suivantes : (i) Les espèces de poissons et de bivalves détectées par l'ADNe dans le cadre de cette étude correspondent bien globalement aux cortèges attendus sur chacun des sites. Sur l'ensemble des cours d'eau étudiés, les communautés détectées sur chaque point de prélèvement sont très hétérogènes et le point aval n'est pas intégrateur de l'ensemble des informations collectées dans les différents milieux situés en amont. En effet, on y retrouve en moyenne 80 % des espèces de poissons détectées à l'amont et 65 % des espèces de bivalves. (ii) A l'échelle d'un transect transversal (rive gauche, centre, rive droite), les prélèvements pris indépendamment détectent en moyenne 83% des espèces de poissons inventoriées sur le transect et 69% des bivalves. En effectuant deux prélèvements, cette détectabilité passe à 95% pour les poissons et 88% pour les bivalves. Dans le cadre de la mise en place d'un réseau de surveillance par ADNe des EEE, cette étude montre que pour optimiser la détection de l'ensemble de la biodiversité dans des milieux aquatiques complexes, notamment les espèces les plus rares, (i) la stratégie d'échantillonnage doit prendre en compte la diversité des milieux (habitats et régimes hydrologiques) présents sur chaque site d'étude, et que des prélèvements ADNe doivent être effectués sur chacun de ces milieux, et (ii) à l'échelle d'un transect (rive droite / centre / rive gauche), il est recommandé d'effectuer plusieurs prélèvements, en maintenant idéalement un volume de 30 litres par prélèvement.
Auteurs du document :
PRIE Vincent,
VALENTINI Alice,
JEAN Pauline,
DEJEAN Tony,
BREUGNOT Emilie,
BREJOUX Eric,
COUPRIE Stéphanie,
IRZ Pascal,
JARDIN Gaelle,
NOWAK Céline,
ROSET Nicolas,
THIERRY Eva,
VIGNERON Thibault,
POULET NicolasMots clés :
PISCES,
MOLLUSCA,
INVASION,
MILIEU AQUATIQUE,
HABITATS - MILIEUX NATURELS,
ADN,
METHODE DE LUTTE,
GESTION POPULATION,
COURS EAU,
ESPECE EXOTIQUE,
EVALUATION,
BIVALVES,
ESPECE EXOTIQUE ENVAHISSANTEThème (issu du Text Mining) :
FAUNEType de ressource :
DocumentSource :
SPYGEN, 10 décembre 2021. 55 p.Droits d'utilisation :
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Rapport technique
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