Dossier spécial - Le réseau des documentalistes à l'heure du numérique et de la création de l'Agence française pour la biodiversité (AFB) : Télécharger
« Produire une connaissance utile, utilisable et utilisée » : cette ambition est partagée par la vingtaine de contributeurs du réseau fédérateur des documentalistes. L’Office international de l’eau (OIEau) et l’Agence française pour la biodiversité (AFB), co-animent de longue date ce réseau dans la sphère de l'eau et maintenant de la biodiversité. À l'ère de l'explosion numérique et de la multiplication des sources, ces acteurs-clés revisitent leurs pratiques pour mettre à disposition, notamment via le portail des documents techniques sur l'eau - devenu le portail des documents sur l’eau et la biodiversité en septembre 2017 - une information porteuse de valeur ajoutée, en phase avec les attentes de publics variés : chercheurs, gestionnaires, journalistes, citoyens.
Inscrit dans cette perspective, le sixième séminaire du réseau fédérateur de compétences documentaires a réuni deux jours durant une vingtaine de professionnel(le)s de la documentation dans le domaine de l'eau (Onema*, Office International de l'Eau, Agences de l'eau, organismes de recherche, pôles-relais zones humides, Aten*...), fin septembre 2016 au centre du Paraclet (Picardie).
Du « text mining » (outils d’analyse textuelle) aux nouvelles pratiques de veille, des problématiques de référencement au « moissonnage » des portails contributeurs vers le guichet unique du portail, les débats techniques qui se sont tenus à cette occasion dessinent en pointillés les grands enjeux d'un ensemble de métiers en pleine évolution, souvent méconnus mais essentiels au dialogue entre science et gestion.
Ce dossier spécial propose de les (re)découvrir sur la base de ce séminaire et de l’actualité 2017. Naviguez à l'aide des onglets en haut de cet article !
* Le 1er janvier 2017, l’Agence des aires marines protégées, l’Atelier technique des espaces naturels, l’Office national de l’eau et des milieux aquatiques et Parcs nationaux de France ont regroupé leurs compétences pour créer l’Agence française pour la biodiversité.
Derrière le portail des « documents techniques sur l'eau » (devenu en 2017 le portail des documents sur l’eau et la biodiversité), outil de référence en France, le réseau des documentalistes fédère depuis une dizaine d’années les compétences documentaires de plus de vingt structures. Une communauté discrète mais passionnée, au cœur des enjeux de transmission des connaissances scientifiques.
Avec plus de 80 500 références bancarisées (en janvier 2017), le portail des « documents techniques sur l'eau » offre un accès unique et gratuit qui tend à recenser l’exhaustivité de productions issues de la recherche et d’études publiques françaises sur l’eau, dans des domaines allant de l'assainissement à l'écologie aquatique, de l'écotoxicologie à l'hydrologie quantitative. Une véritable mine d'information qui permet chaque mois à plus de 15 000 visiteurs (chiffre conséquent pour la fréquentation d’un portail documentaire), chercheurs, gestionnaires, journalistes, étudiants ou simples citoyens, d'accéder en quelques clics aux articles scientifiques, synthèses, guides méthodologiques ou notices en lien avec leurs recherches. Lancé en 2009, en réponse à la convention d'Aarhus sur l'accès aux données publiques sur l'environnement, le portail a vu sa base documentaire s'étoffer avec l'arrivée progressive de nouveaux contributeurs, s'imposant comme un outil de référence en France.
Si son interface est familière des acteurs en France, le fonctionnement du portail l'est sans doute beaucoup moins. Il mobilise un large éventail de compétences techniques, informatiques et documentaires. L'Office international de l'eau (OIEau) y tient un rôle important : à la fois administrateur informatique et contributeur, il co-anime avec l’AFB deux fois par an le comité de pilotage, où sont validées les évolutions techniques de l'outil. « Le comité de pilotage de décembre 2016 a notamment été consacré au déploiement de l'interface web responsive, utilisable sur tablettes et smartphones », précise Stéphanie Laronde, en charge de l'information et de la gestion des données à l'OIEau. Les évolutions de l'outil et son alimentation impliquent bien sûr les documentalistes des organismes producteurs ou relayeurs de documents publics sur l'eau : l'Onema (aujourd’hui intégré à l’AFB), les agences et offices de l'eau, le ministère en charge de l’écologie, les organismes de recherche comme Irstea, le BRGM, l'Ineris, l'Ifremer, l'Inra ou encore, plus récemment, les pôles-relais zones humides et en 2017 le Museum d’histoire naturelle de Paris. Chacun des contributeurs voit sa base documentaire régulièrement « moissonnée » par le portail, selon des règles et des modalités qui diffèrent d'un organisme à l'autre.
C'est ce groupe élargi, fort aujourd'hui d'une cinquantaine de personnes, qui constitue le réseau fédérateur des compétences documentaires sur l'eau. « Une communauté soudée par le moteur commun de l'entretien et de l'amélioration du portail mais aussi, plus largement, par la volonté de partager les compétences et de réfléchir collectivement aux évolutions de nos métiers et aux nouveaux enjeux liés à la documentation », explique Françoise Bunch, chargée de mission documentation scientifique et technique à l'AFB. Le réseau a été organisé et animé par l’OIEau et l’Onema en associant les agences de l’eau et le ministère en charge de l’écologie , pour s’élargir dès 2008 au monde de la recherche, aux offices des DOM et aux pôles relais zones humides, participant à une dynamique générale dans le domaine de la diffusion de la connaissance (directives européennes, objectifs environnementaux…). Ce réseau a permis au fil des années de mutualiser les ressources documentaires (via le portail) : les outils (tel que le Thésaurus), les services documentaires (comme les services de veille juridique) ou encore des services à valeur ajoutée tels que la valorisation thématique via les « Zoom thématiques » du portail). Il favorise les échanges de compétences entre les membres partenaires et l’ouverture sur les réseaux extérieurs.
Les séminaires successifs ont permis de balayer de nombreux thèmes : expertise collective, web sémantique, réseaux sociaux, données publiques, droit d’auteur et droit à l’information, veille, web 2.0, géo-référencement… Le sixième s'est tenu les 22 et 23 septembre 2016 au Paraclet, un des centres de formation de l’AFB. L'occasion pour les 25 participants d'échanger les nouveautés sur leur activité respective – ici la numérisation d'un fonds de 150 études sur les réseaux d'eau potable, là le lancement d'une photothèque, ailleurs la mise en place de nouvelles veilles thématiques… Il y fut aussi question des centres de ressources qui participent à la politique de transfert des connaissances de l’AFB, et de leur articulation à construire avec l'action des documentalistes. Il y fut encore question de droits de publication, de gestion des embargos (délai de publication demandé par certains éditeurs), de compromis entre publication en archives ouvertes et politique commerciale des éditeurs – « des sujets récurrents dans le domaine documentaire, sur lesquels il est essentiel d'échanger collégialement », souligne Stéphanie Laronde. Enfin, pour en revenir au portail documentaire, les participants ont proposé, à travers un exercice collectif de Barcamp, un ensemble de pistes pour en améliorer le référencement, les fonctionnalités et l'ergonomie. En attendant de relever les challenges documentaires qu'implique le rapprochement des thématiques au sein de l'AFB, le portail moissonnera dès 2017 les bases documentaires des organismes intégrés dans l’Agence française pour la biodiversité (Agence des aires marines protégées, Aten, Fédération des conservatoires botaniques nationaux) jetant les bases d'un portail unique pour les documents publics sur l'eau et la biodiversité. Cela sera à n'en pas douter au programme du prochain séminaire du réseau des documentalistes, annoncé à Toulouse au printemps 2018.
Depuis sa mise en ligne en 2009, le portail a régulièrement proposé à ses utilisateurs des innovations dans son ergonomie et ses fonctionnalités. Quelques repères :
L'alimentation du portail des documents techniques sur l'eau repose sur le protocole Open Archives Initiative (OAI) : une architecture dite « répartie », où les documents ne sont pas centralisés à l'OIEau mais restent propriété des différents centres de documentation contributeurs. En pratique, chaque organisme contributeur dispose d'un entrepôt OAI, un service web ouvert sur lequel la documentaliste met à disposition les métadonnées – notices documentaires et liens vers les contenus. Le portail vient "moissonner" automatiquement ces entrepôts, selon une fréquence temporelle et des modalités paramétrées au préalable. Il est aussi possible de demander ponctuellement à un OAI l'ensemble de ses métadonnées, ou seulement les données postérieures à une certaine date, ou encore de l'interroger sur un corpus restreint (par exemple : les eaux souterraines) en utilisant les collections.
À noter que le portail hébergé à l'OIEau dispose aussi de son propre OAI, ce qui lui permet d'être moissonné à son tour par des tiers, comme par exemple le portail Tout sur l'environnement (TSE).
Avec l'explosion de l'information numérique, l'image de la bibliothèque poussiéreuse a vécu : les documentalistes revisitent leurs métiers à l'aune d'outils et de compétences nouvelles pour extraire du flux de documents les sources fiables et les contenus pertinents.
« Infobésité ». Le terme revient souvent pour désigner cette réalité contemporaine : la production d'informations par tous et partout, en un flux permanent qui rend toujours plus difficile l'accès à la connaissance utile et validée sur un sujet donné. Une réalité bien connue des documentalistes scientifiques : « C'est, avec la numérisation, la grande évolution à laquelle nous devons faire face dans nos métiers, indique Gwénaëlle Arons, chargée de mission veille documentaire scientifique et technique à l’AFB). L'explosion de la publication en ligne a vu les centres de documentation spécialisés passer de la gestion d'une certaine rareté à la gestion de la surabondance ». La forme même des documents s’est hybridée : hier essentiellement textuelle, elle associe aujourd’hui texte, photo, vidéo, infographie et donnée. En parallèle, les comportements des contributeurs comme des utilisateurs se sont transformés : avec le recul du papier, la fréquentation physique des centres documentaires a sensiblement diminué et les attentes se concentrent désormais sur la mise à disposition de contenus numériques et les outils de recherche associés.
Face à cette information pléthorique, l'exhaustivité n'est plus de mise pour les documentalistes. « Les enjeux consistent maintenant à éviter la redondance et le bruit, à proposer une information fiable en recherchant les sources crédibles, tout en maintenant une diversité de points de vue », analyse Gwénaëlle Arons. La chaîne documentaire a évolué en conséquence : le schéma classique « collecte-traitement-diffusion » s'est diversifié et s'est hybridé, et la veille documentaire y prend une importance croissante. « Nos utilisateurs ont de moins en moins le temps ou les compétences pour réaliser une veille individuelle, observe Ludivine Coincenot, documentaliste au Pôle-relais Tourbières : il nous revient, en tant que spécialistes de la gestion de l'information, de répondre à ce besoin." » Et de mobiliser pour ce faire de nouvelles pratiques, exploitant les fonctionnalités du web 2.0 et des réseaux sociaux pour surveiller et filtrer efficacement, au quotidien, le flux de l'actualité (voir cet éclairage).
De même, à l'autre extrémité de la chaîne, les documentalistes s'attachent de plus en plus à mettre en relief l'information diffusée à leurs publics via des canaux bien identifiés, par exemple en proposant des sélections mensuelles d'articles, des notes de lecture ou des revues de presse thématiques. Plus largement, « la médiation documentaire, c’est-à-dire tout ce qui fait le lien entre les ressources documentaires et le public, a pris une part croissante dans notre activité », témoigne Virginie Talleux, documentaliste à l’agence de l’eau Loire Bretagne. Cette médiation englobe les nombreuses actions de communication menées en interne ou à l’externe – « par exemple, nous participons aux événements organisés par l’agence, en animant des ateliers ou en concevant des outils de communication thématiques », mais aussi, de plus en plus, un travail sur la donnée elle-même : « nous utilisons des outils d’extraction et de visualisation dynamique, pour traiter les données brutes et les rendre lisibles par différents publics », souligne Virginie Talleux. Pour apporter l’information ou le document le plus pertinent à leurs utilisateurs, les documentalistes ne manquent pas d’idées. Tout est possible… ou presque : le respect des droits de propriété et de diffusion des contenus, qui diffèrent selon les éditeurs, reste une contrainte forte pour les centres de documentation.
« Dans les cas où nous ne pouvons pas donner accès directement au document, celui-ci peut toujours être indexé dans une base documentaire sous la forme de notice seule, souligne Ludivine Coincenot. L’essentiel : c’est que l’utilisateur qui fait une recherche ciblée sur nos outils, ne passe pas à côté d’un contenu pertinent, quitte à faire le nécessaire ensuite pour se le procurer – ce en quoi nous pouvons aussi l’aider ! »
Pour générer du trafic et améliorer le référencement des sites et des portails documentaires sur les moteurs de recherche, les mises à jour régulières sont recommandées, via notamment l'ajout de vidéos et de contenus multimédia. Mais les enjeux quantitatifs, essentiels pour exister sur la Toile, sont indissociables de la recherche de pertinence sur le fond. « Cette diffusion à valeur ajoutée, aussi appelée curation de l'information, implique d'avoir au préalable une bonne connaissance des attentes de nos publics », souligne Ludivine Coincenot. Un point essentiel, et qui constitue sans doute l'une des grandes constantes du métier : à l'heure où les réseaux virtuels, le data mining (outils d’analyse de données) et les supports électroniques prennent une place toujours plus importante dans le quotidien des « documentalistes 2.0 », le lien avec l'utilisateur reste avant tout une affaire humaine. « Ces outils nous sont désormais indispensables pour gagner du temps et automatiser certains maillons de la chaîne documentaire, devenue plus complexe et plus volumineuse, résume Françoise Bunch. Mais le meilleur algorithme ne vaudra jamais l'œil, les oreilles et l'expertise qui nous permettent d'identifier le contenu qui fait sens, pour une demande et dans un contexte donné. » Et de vous le proposer avec le sourire !
Plus complexe, plus technique, moins centralisée, la chaîne documentaire mobilise aujourd'hui un large faisceau de compétences et d'acteurs spécialisés : de la veille thématique au développement logiciel, de la communication web à la gestion des bases de données… Une diversité de profils dont cette représentation cartographique, proposée par l'Association des documentalistes et bibliothécaires spécialisés (ADBS), donne un aperçu. À défaut d'exhaustivité, quelques professionnel(le)s du réseau des documentalistes sur l'eau et la biodiversité apportent ici un éclairage sur leurs pratiques respectives : regards croisés.
En tant que documentaliste, ma mission première est d'informer sur l'actualité en lien avec la biodiversité, les collaborateurs, mais aussi divers professionnels de la protection de la nature qui nous suivent, notamment dans les espaces naturels protégés ou les collectivités. La veille documentaire occupe donc une part importante de mon travail. Au départ nous avions un fonctionnement classique avec une bibliothèque, alimentée par une politique d'achats d'ouvrages et nos membres qui nous adressaient leurs productions. Mais les pratiques ont beaucoup changé en moins de 10 ans : aujourd'hui je reçois encore un peu de documentation, mais l'essentiel de la veille provient de ce que je « pêche » moi-même, en filtrant le web à l'aide d'un éventail d'outils numériques.
Je révise mon travail de sourcing régulièrement, et suis abonnée à différents flux RSS et comptes Twitter de curateurs : de fil en aiguille, j'ai ainsi pu identifier une communauté d'acteurs et de producteurs intéressants et complémentaires, qui panache les sources académiques, les médias traditionnels, des bureaux d'études et même des particuliers. Mon approche est très orientée presse spécialisée, avec un intérêt fort pour les sujets émergents. Et une fois l'information collectée, il faut encore l'exploiter en y apportant un regard propre et une valeur ajoutée. L'Aten, puis l’AFB en 2017, propose notamment son propre fil d'actualité sur Twitter, et deux revues de presse sur Scoopit : ces canaux nous identifient à notre tour comme des interlocuteurs crédibles sur le web, et nous valent d'être suivis comme tels !
Le portail des documents techniques sur l'eau, dont je suis l'un des concepteurs pour sa partie informatique, représente aujourd'hui encore une bonne partie de mon temps de travail. Parmi les tâches liées à son fonctionnement et à son entretien, je supervise le « moissonnage » des entrepôts OAI de nos contributeurs : celui-ci se fait automatiquement mais il faut gérer les paramétrages, contrôler régulièrement ce qui a été moissonné et souvent corriger de petites erreurs. Avec trois autres informaticiens, je m'occupe aussi d'accompagner les nouveaux contributeurs du portail, dans leurs choix techniques et pour la réalisation de tests liés à la mise en œuvre de leur entrepôt OAI. Et puis, bien sûr, nous apportons régulièrement de nouveaux services et fonctionnalités sur le portail.
En 2016, il y a eu notamment la mise en œuvre du text mining sur l'ensemble de l'OAI de l'agence de l'eau Rhône Méditerranée et Corse (AE-RMC) : 18 000 notices et 4 000 documents en plein texte ont été analysés (en 12 jours-machine) par l'algorithme, ce qui permet d'améliorer et de standardiser leur thématisation, et donc de rendre plus efficace la recherche pour nos utilisateurs : l'AE-RMC a ouvert le bal mais l'idée est de le faire pour tous les contributeurs. Parmi les autres projets récents, je citerai aussi le développement de la version web responsive du portail, optimisée pour portables et tablettes. En pratique, tout cela se fait grâce à un contact très régulier avec les documentalistes, mais aussi avec les services informatiques de leurs structures : je suis aujourd'hui bien identifié comme une personne « ressource » pour le réseau des documentalistes !
L’Ifremer possède un fonds documentaire important, réparti essentiellement entre les bibliothèques de Brest et Nantes (BLP – Bibliothèque La Pérouse). Sur le site de Nantes, où nous sommes deux documentalistes, nous avons un fonds d’environ 20 000 références d’ouvrages, dont certains très anciens, et environ 2 500 collections de périodiques avec une spécialisation « Pêche et cultures marines ». Mais ma principale mission est transverse à tout l’institut : j’administre la base Archimer, une archive institutionnelle en ligne où nous référençons la production documentaire de l’Ifremer et de ses deux organismes parents1 , ainsi que celle issue de l’utilisation de la flotte océanographique française, avec quand cela est possible un accès libre aux documents.
En pratique, cela implique de détecter et récupérer, chaque jour, tous les nouveaux documents (publications, rapports, notes techniques, actes de colloques, etc.) mis en ligne sur Internet. Les chercheurs commencent à prendre l’habitude de nous les signaler, mais j’utilise différents outils/alertes pour que rien ne passe à travers les mailles du filet : alertes Google, recherche hebdomadaire sur le Web of science… Je procède aux dépôts (il faut renseigner les champs obligatoires des notices en fonction du type des documents, et archiver ces derniers). Il faut aussi rattraper le passif : l’OSTPM2 , un des ancêtres de l’Ifremer, aura 100 ans en 2018 ! En tout, Archimer occupe entre la moitié et les trois quarts de mon temps.
Par ailleurs je suis en charge du service de fourniture de documents, pour les utilisateurs internes mais aussi externes. Et bien sûr, Archimer contribue au portail des documents techniques sur l’eau : l’Ifremer travaille surtout sur la mer, mais une partie de ses productions porte sur les estuaires, et nous avons, à Nantes, un petit fonds sur l’anguille et le saumon, entre autres. Les documents concernés sont extraits et déposés sur notre entrepôt OAI, et le moissonnage automatique fait le reste !
À Toulouse, nous sommes deux documentalistes pour répondre aux besoins internes et externes : pour ma part, je suis chargée des demandes documentaires externes et je m’occupe notamment de la collecte et de l’indexation des études financées (maîtrise d’ouvrage) ou subventionnées par l’Agence en vue d’alimenter le portail des documents techniques sur l’eau. Ma première mission est donc de suivre et repérer toutes les études produites au siège et sur nos cinq sites : Bordeaux, Pau, Rodez, Brive et Toulouse. Pour cela, j’anime régulièrement un réseau de référents documentaires tout au long de l’année en organisant des réunions téléphoniques et à minima, une réunion « études » annuelle au siège avec l’ensemble des intéressés.
Sur chaque site, un contact documentaire a été désigné pour assurer le suivi et la collecte des études, il me fait parvenir les documents au fil de l’eau, en version numérique ou version papier, avec si possible une fiche résumé d’étude où figurent le titre, un résumé synthétique, des mots-clés, des descripteurs géographiques et le numéro du dossier d’aide financière. Pour ma part, je finalise la fiche résumé en y ajoutant la cote documentaire et certaines mentions. Une fois indexées dans la base documentaire, les études sont prêtes pour l’export vers le portail national. Je produis les notices d’accompagnement avec les fichiers numériques qui s’y rapportent et je les dépose sur notre entrepôt « OAI », où elles sont régulièrement moissonnées par le portail national. Toute cette partie « études » occupe au moins les deux tiers de mon temps.
Le reste se répartit entre l’accueil du public sur rendez-vous, la commande, le suivi et le référencement des ouvrages que nous achetons, et également la gestion et la relance des prêts d’ouvrages. Sans oublier le traitement des demandes d’information environnementales (DIE) : l’agence reçoit plus de 200 mails par an, qui portent par exemple sur la qualité de l’eau d’une rivière, les performances d’une station d’épuration ou sur un autre thème suivi par l’agence. Si la demande d’information reçue ne correspond pas à une demande purement documentaire (recherche bibliographique, demande de consultation sur place), je transfère ces demandes vers les personnes ressources des services techniques. Pour les demandes de données sur l’eau, j’aiguille l’interlocuteur vers le système d’information sur l’eau (SIE) du bassin Adour-Garonne. Je fais aussi chaque trimestre le suivi statistique de ces demandes d’information et je prépare annuellement un bilan et une analyse de l’ensemble des demandes reçues.
Notre service documentation a été créé en même temps que l’agence, il y a 50 ans. Nous sommes aujourd’hui deux documentalistes et une assistante pour gérer un fonds de 23 000 documents, constitué en majorité des études produites sous maîtrise d’ouvrage de l’agence ou cofinancées par elle. Nous assurons les missions classiques de gestion des achats d’ouvrages ou de revues, d’accueil et de réponse aux demandes du public, de collecte et d’indexation des études – avec l’appui pour ce dernier point de nos de relais, formés par nos soins dans les quatre délégations. Mais il y a tout de même une grosse particularité à l’AE-RMC : chez nous le support papier n’est pas mort, il est même bien vivant ! Si aujourd’hui la majorité des nouvelles études sont indexées au format numérique, notre fonds est constitué à 80 % de support papier, les 20 % restants étant papier et numérique. Le tout est rassemblé dans une bibliothèque d’environ 300 mètres linéaires, au siège lyonnais de l’agence. Les délégations ont leur fonds également. Un choix fait par manque de moyens pour numériser les documents, mais qui s’avère aujourd’hui tout-à-fait validé par nos utilisateurs.
Nos publics viennent consulter les documents sur place, ou les empruntent : nous avons 500 prêts en moyenne par an. Il n’est pas rare de voir des utilisateurs – y compris des moins de 30 ans – préférer le papier au numérique, par exemple pour de grands plans au format A0, type restauration d’axes de migration de poissons ou cartographie. Mais bien sûr, 100 % de nos documents sont dûment référencés par leur notice dans notre base de données locale, et notre entrepôt OAI nous permet d’alimenter régulièrement le portail national des documents techniques sur l’eau. En résumé, la « culture papier » est ici pleinement compatible avec les outils numériques.
1 - L’Ifremer est né de la fusion, en 1984, du Centre national pour l'exploitation des océans (CNEXO) et de l'Institut scientifique et technique des pêches maritimes (ISTPM)
2 - L’OSTPM est l’organisme dont est issu l’ISTPM
Sous l'impulsion de l'Agence française pour la biodiversité (AFB), les « centres de ressources » thématiques joueront un rôle central à l'interface science-gestion pour le déploiement des politiques publiques… et qui dit ressources dit documentation ! Le séminaire du Paraclet a initié une réflexion nécessaire sur l'intégration de ces structures d'un genre nouveau dans l'écosystème documentaire sur l'eau et la biodiversité.
Pour la mise en œuvre de la trame verte et bleue, pour l'appui aux acteurs du génie écologique, pour la préservation des zones humides (via les pôles-relais), pour la protection des captages d'eau potable, et bientôt la gestion des espèces invasives ou des plans d'eau… Le déploiement territorial des politiques publiques va s'appuyer sur la création de « centres de ressources » thématiques, pilotés par l’Agence française pour la biodiversité. Le séminaire du Paraclet a d’abord permis de repréciser la définition (au sens de l’AFB) de ces structures d’un type nouveau, animées d'une triple finalité : la mise en réseau des acteurs autour d'une thématique identifiée, en lien avec les politiques publiques ; la mise à disposition et la valorisation des outils et connaissances en lien avec cette thématique ; ainsi que l'appui et l'accompagnement des acteurs pour la mise en œuvre opérationnelle. Chacun de ces dispositifs émergents, déjà lancés pour certains, en gestation pour d'autres, appuie une partie de son action sur une base documentaire dédiée. Une mission qui intéresse de près le réseau des documentalistes sur l'eau et la biodiversité, et qui a notamment fait l'objet de présentations et de discussions lors du séminaire.
Intervenant en introduction du séminaire, Aurélien Dalloz (Aten, désormais AFB) a rappelé la définition et les missions d'un centre de ressources (au sens de l'AFB), puis a développé le cas du centre de ressources Trame verte et bleue (TVB), qu'il anime à destination d'un public mêlant notamment collectivités, associations, services de l'État et acteurs socio-économiques. Mis en visibilité via son site internet www.trameverteetbleue.fr le centre de ressources déploie depuis 2011 une large palette d'actions et d'outils pour accompagner la mise en œuvre de la TVB. « Parmi ceux-ci, une offre de formation, un groupe d'échange technique, mais aussi un ensemble de produits documentaires issus d'une veille spécifique, détaille le chargé de mission : synthèse de colloques, guides méthodologiques, rapport de programmes de recherche, lettre d'information, ainsi qu'un moteur de recherche de références bibliographiques ». La présentation soulignait en conclusion le besoin de mutualisation d'outils (annuaires, réseaux sociaux, bibliographies, newsletters) entre les différents centres de ressources pilotés par l'AFB, et avec les sites partenaires. Et lançait la réflexion sur les modalités de collaboration à créer entre les spécialistes et référents thématiques des centres de ressources, et le réseau des documentalistes.
Une deuxième contribution (Didier Delage, gestion et valorisation de l'information à l'OIEau) présentait une enquête menée conjointement par l'Onema et l'OIEau sur un panel de centres de ressources identifiés en France, pour en comparer les caractéristiques (structures porteuses, financements, publics visés…). Une vingtaine de structures étaient étudiées, dans des domaines allant de l'environnement à la santé ou à la gestion des risques : Ademe, centre de ressources Loire Nature, Fédération nationale des agences d'urbanisme, Cerema, Observatoire de la côte aquitaine… Une première distinction était faite entre les véritables centres de ressources au sens de l'AFB, dotés d'une mission d'intérêt général, et d'autres structures se rapprochant davantage de « têtes de réseaux » professionnels, et s'adressant essentiellement à leurs membres. La discussion proposée par Didier Delage identifiait ensuite un ensemble de critères de succès pour un centre de ressources. Celui-ci doit d'abord s'implanter dans un contexte favorable : une thématique porteuse, appuyée par un environnement législatif et réglementaire spécifique, sur un territoire confronté à des pressions. Il doit être doté d'outils optimisés et fédérateurs : outils collaboratifs, serveurs mutualisés, temps d'échanges entre partenaires, relais locaux. Enfin, et surtout, il doit bénéficier de moyens humains suffisants.
Les contributions évoquées ci-dessus viennent alimenter une réflexion à venir sur l'articulation des composantes documentaires des centres de ressources avec le réseau d'outils et d'acteurs existants dans le champ de la documentation sur l'eau et la biodiversité. Au plan technique, des extractions devront notamment être mises en place pour permettre aux futurs centres de ressources de « moissonner » un outil commun sur les références bibliographiques. Certaines passerelles sont d'ailleurs déjà opérationnelles, mais peuvent être optimisées ou modernisées. « Nous réalisons par exemple une extraction automatique du portail des documents techniques sur l'eau pour alimenter le portail zones-humides.eaufrance.fr, qui apporte un enrichissement des ressources documentaires aux pôles-relais zones humides », indique Françoise Bunch, chargée de mission documentation scientifique et technique à l'AFB. De même, pour le centre de ressources Captages que pilotera l'AFB : « L'OIEau est en train de développer le site aires-captages, qui comprendra un portail documentaire dédié, indique Stéphanie Laronde. Celui-ci sera alimenté pour partie par une extraction du portail national des documents techniques sur l'eau ; inversement certains documents originaux, produits par exemple par les animateurs captages, pourront alimenter le portail. » Des règles communes devront être adoptées pour encadrer ce moissonnage inter-portails et éviter la redondance. En parallèle, le référencement des documents publics sur l'eau sera adapté à ce contexte nouveau : « Le thésaurus commun sur l'eau, mis à jour régulièrement, pourrait évoluer en priorité vers les thématiques des centres de ressources », annonce Françoise Bunch. Quant aux animateurs des futurs centres de ressources, ils auront bien sûrs des liens privilégiés avec le réseau des documentalistes !
Lors du dernier séminaire du réseau des documentalistes, les participants se sont livrés à un exercice original de « Barcamp », visant à faire émerger des pistes d'amélioration pour les centres de ressources et les sites partenaires du réseau en matière de référencement, de modalités de recherche ou d'ergonomie. Compte-rendu.
Dans la peau d'un chargé de mission en urbanisme, d'une apicultrice cherchant à développer son projet, d'un groupe de chercheurs travaillant sur les espèces invasives, ou d'un collectif associatif engagé dans la préservation des zones humides : les participants au séminaire du Paraclet, réunis en quatre groupes, ont participé une heure durant au jeu de la recherche d'informations en ligne pour tester l'accessibilité et la pertinence des contenus proposés par le portail documentaire, les centres de ressources et les sites partenaires du réseau. À l'issue de cet exercice en situation, chaque groupe « d'utilisateurs » a présenté en plénière ses observations – points forts, points faibles, axes d'amélioration. Cette étape a débouché sur une réflexion collective, qui a permis d'ordonner les idées et propositions selon quatre thématiques principales : référencement, modalités de recherche, ergonomie, maintenance et qualité du contenu. Si certaines observations (notamment pour le dernier point) concernaient directement l'un ou l'autre des sites testés, il ressort de l'atelier une série de propositions de portée plus générale, pertinentes notamment pour la phase actuelle de conception des centres de ressources.
Sur la Toile, le contenu le plus pertinent restera invisible (hors initiés) s'il est mal référencé par les principaux moteurs de recherche. Or le référencement est justement l'un des gros axes de progression identifiés pour certains des sites documentaires sur l'eau et la biodiversité – à commencer par le portail des documents techniques sur l’eau. Il existe deux manières d'améliorer celui-ci : opter pour le référencement payant (liens sponsorisés permettant de positionner un site internet dans les premiers résultats des moteurs de recherche), ou favoriser le référencement naturel par les moteurs de recherche. L'exercice de Barcamp a identifié quelques axes de travail pour activer cette seconde option. Un premier levier consiste à apporter régulièrement des changements (détectés en priorité par les robots qui scannent l'Internet) sur les pages web concernées : la tenue d'une rubrique « actualités », fréquemment mise à jour en page d'accueil ; l'ajout de liens vers des adresses url actives ; le recours à des contenus multimédias, du type photo ou vidéo. Quelques points techniques, issus des protocoles de référencement manuel des moteurs de recherche, sont également rappelés : l'utilisation en priorité du format https, et un soin apporté au choix des mots-clés utilisés pour le référencement des pages, qui doivent refléter le contenu sans être trop techniques. Un travail expert, qui justifierait une collaboration spécifique entre les documentalistes et leurs services informatiques. Enfin, un site est d'autant mieux référencé qu'il possède des liens actifs avec d'autres sites eux-mêmes référencés : ce référencement « croisé », faisant appel à des relais web, peut résulter d'une véritable stratégie de réseau qui apparaît largement mutualisable dans le cadre des centres de ressources AFB et de leurs sites partenaires.
Parmi les autres suggestions issues du Barcamp, certaines portent sur les modalités de recherche sur les portails documentaires. Il est notamment proposé de simplifier les critères de la recherche avancée (notamment pour le portail des documents techniques sur l’eau), ou d'offrir des options de recherche différentes selon les profils d'utilisateur. Autre piste encouragée (et déjà mise en œuvre sur certains sites), l'ouverture de possibilités de recherche spatialisée, avec une maille pertinente selon la thématique du portail : par région administrative (comme c'est le cas pour le centre de ressources Trame verte et bleue), par territoire, ou encore par bassin versant. En matière d'ergonomie, un premier point, souligné par les quatre groupes, concerne le développement de version web responsive des sites, permettant une navigation optimisée sur téléphones et tablettes. Récemment mise en œuvre sur le portail des documents techniques sur l’eau, cette évolution conditionne aussi le référencement, de plus en plus de recherches s'effectuant désormais depuis un support mobile. Les participants listent également quelques points d'amélioration sur les interfaces web : la suppression autant que possible des « ascenseurs » sur les pages, l'homogénéisation des chartes graphiques sur l'ensemble d'un site, un effort pour rendre plus ludique la navigation – par exemple en présentant sous forme de carrousel les couvertures des études récemment indexées, ce qui contribue aussi à améliorer le référencement. Plus largement, ils soulignent la nécessité d'adapter davantage les portails documentaires aux évolutions actuelles de l'ergonomie à l'ère du web 2.0, et l'importance pour ce faire d'un accompagnement par des spécialistes. Parmi ces grandes tendances, la personnalisation de l'expérience de navigation (de nombreux portails offrent aujourd'hui une page d'accueil customisée selon les centres d'intérêt de l'internaute), et la possibilité pour l'utilisateur d'interagir avec le site… par exemple en répondant à des sondages en ligne, pour recueillir ses besoins et suggestions d'amélioration du service !