Suivi des changements de distribution hivernale du lièvre variable Lepus timidus et du lièvre d'Europe Lepus europaeus sur leur zone de contact dans les Alpes françaises. Rapport méthodologique, protocole version 1 (août 2021)
Authentique espèce arctico-alpine, le Lièvre variable (Lepus timidus) vit dans les Alpes en populations relictuelles isolées en moyenne et haute altitude. Son aire de distribution devrait vraisemblablement se contracter avec l'élévation des températures, isolant davantage les populations. Les populations de moyenne à haute altitude pourraient ainsi disparaître dans les prochaines décennies. Le Lièvre d'Europe (Lepus europaeus) pourrait quant à lui profiter de l'augmentation des températures et étendre son aire de distribution plus en altitude, entraînant des phénomènes de compétition ou d'hybridation avec le lièvre variable. Nous avons mis en place une étude pilote afin de définir un protocole permettant de suivre ces changements. L'environnement montagnard (forêts, éboulis, etc.) et les conditions d'accès difficiles compliquent le suivi et l'observation des espèces en général. Le lièvre variable est plus particulièrement difficile à observer en raison de la couleur mimétique de son pelage (blanc en hiver et brun en été) et de son comportement nocturne et discret. Le développement des techniques d'analyse génétique (échantillonnage génétique non invasif) permet cependant aujourd'hui l'identification des espèces et des individus à partir de fèces récoltées sur le terrain et vient donc faciliter leur détection. Notre étude-pilote a débuté en 2018 dans le Parc national du Mercantour. Nous avons ajusté un premier modèle de niche basé sur des données de présence-simple de lièvres collectées depuis plusieurs années par les agents de terrain et combinées à des variables environnementales topographiques, d'occupation du sol et climatiques. Nous avons ensuite appliqué un maillage de 2 km sur les zones prédites comme favorables à la présence des deux espèces par ce modèle de niche, en excluant les mailles trop pentues ou à faible enneigement. Vingt et une mailles sélectionnées aléatoirement ont été prospectées en ski ou en raquettes au cours de deux hivers successifs par deux à quatre observateurs qui ont collecté des fèces dans la neige. L'enregistrement de leur parcours a permis de générer des sous-mailles de 100 m sur 100 m et d'y associer la présence ou l'absence de l'une ou l'autre espèce de lièvre en fonction des résultats des analyses génétiques. Les 375 données de présence et 2483 données d'absence ainsi obtenues ont été utilisées pour ajuster des nouveaux modèles de niche. La plus grande homogénéité des courbes de réponse montre que les modèles en présence-absence ont considérablement amélioré la précision de la distribution prédite pour les deux espèces. La durée annuelle de la couverture neigeuse était le meilleur prédicteur des probabilités d'occurrence des deux espèces, corrélée négativement pour le lièvre d'Europe et positivement pour le lièvre variable, et faisant ainsi apparaître des distributions très ségrégées. Nous nous appuyons sur cette étude-pilote pour proposer une stratégie de déploiement de ce protocole sur la plupart des aires protégées françaises alpines dans les années à venir. La mise en place de ce protocole devrait fournir une vision plus précise et plus objective de la distribution actuelle des deux espèces de lièvres et aider à prévoir et à mesurer les effets des changements climatiques ou tout autre facteur pouvant agir sur la distribution des deux espèces à long terme. Ce document justifie les choix méthodologiques réalisés et propose un cadre pour le recueil, le stockage et l'analyse des données. Il fixe également les moyens logistiques nécessaires à la mise en oeuvre du protocole proposé. L'ensemble de ces informations garantit la pérennité de l'étude sur le long terme. L'élaboration de ce protocole s'inscrit dans le cadre d'une coopération entre l'Office Français de la Biodiversité et le Centre d'Ecologie Fonctionnelle et Evolutive. Cette coopération lancée en 2018 vise à mettre en place un appui méthodologique et statistique pour un transfert continu de compétences, de savoirs, de méthodes, vers les gestionnaires des parcs nationaux et des autres aires protégées.
Auteurs du document :
COUTURIER T., MANSONS J., CAVAILHES J., IMBERDIS L., BUNZ Y., GOUSSOT A., DELESTRADE A., QUENEY G., JAILLOUX A., BESNARD A., CEFE, PARC NATIONAL MERCANTOUR, PARC NATIONAL VANOISE, PARC NATIONAL ECRINS, PAR REGIONAL QUERAS, CENTRE DE RECHERCHE SUR LES SYSTEMES D'ALTITUDE, ANTAGENE, OFB, LETTY J., GAREL M., OFB
Diffuseur des métadonnées :
Office français de la biodiversité
Mots clés :
PARC NATIONAL, PARC NATUREL REGIONAL, MONTAGNE, ALTITUDE, DISTRIBUTION, PARC NATIONAL MERCANTOUR, PARC NATIONAL ECRINS, PARC NATIONAL VANOISE, PARC REGIONAL QUEYRAS, MONT-BLANC, CHANGEMENT CLIMATIQUE, LIEVRE, MODELE DE NICHE, ECHANTILLONNAGE GENETIQUE NON INVASIF, NIG, PROTOCOLE
Thème (issu du Text Mining) :
CLIMATOLOGIE, AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PAYSAGE, MILIEU NATUREL
Un permalien est l'URL initiale d'un article ou d'une page, conçu pour refèrer un élément d'information et rester inchangé de façon permanente.Permalien :