ROULEPUR - Maîtrise de la contamination des eaux de voirie. Tâche 5 - Livrable L5.b. Analyse transversale des récits d'innovation. Rapport final
Autre denomination :
Cross-analysis of the narrative innovations
Comment les dispositifs destinés à recueillir et à traiter les eaux pluviales à l'aval des routes sont-ils appropriés par les services des collectivités ? Quels sont les freins à leur adoption ? Quelles difficultés posent-ils à ceux qui ont en charge leur gestion et leur maintenance ? Afin de répondre à ces questions, les sociologues associés au projet ROULÉPUR ont conduits 27 entretiens semi-directifs avec les principaux acteurs de 4 dispositifs innovants en Ile-de-France. Ils ont analysé leurs productions documentaires et observé leurs réunions techniques. Dans le livrable 5.a, les informations recueillies ont servi à construire des récits d'innovation qui permettent de saisir au plus près le développement et l'évolution concomitante des objets techniques et des systèmes d'acteurs qui les accompagnent. La comparaison de ces différentes narrations qui fait l'objet de ce rapport (livrable 5.b) permet de rendre compte de la manière dont les acteurs et les techniques construisent la qualité des eaux de ruissellement de voirie en un enjeu de gestion de la ville. Dans tous les cas étudiés, cette " question de la qualité " est un défi au fonctionnement " normal " de l'administration. L'inscription sur l'agenda des services administratifs de cette question entraîne des tensions entre les services car la responsabilité du dimensionnement (lorsqu'il s'agit d'une solution industrielle) ou de la conception (lorsqu'il s'agit d'une solution ad hoc) ou encore de la responsabilité de l'entretien et de la maintenance demeurent, d'un point de vue procédural, tout à fait flous. Le cloisonnement inter et intra-services, et le décalage entre des pratiques et des cultures professionnelles préexistantes, est une source d'incompréhension qui contraint la conception même du dispositif (son design), son entretien et qui peuvent conduire à obérer sa fonction de dépollution. L'expérimentation autour de ces dispositifs requiert alors un partage de compétences et de savoir-faire jusqu'alors inexistants : l'assainisseur doit se faire chercheur tandis que le chercheur se voit contraint de coproduire le dispositif à tester. L'évaluation et l'optimisation des performances représentent toutefois une mise à l'épreuve des réseaux d'acteurs existants. C'est un moment qui voit se confronter différentes définitions de la qualité : une définition scientifique faite de méthodes d'instrumentation données extrêmement précises et rigoureuses ; une définition de la qualité non spécifiée en ce qui concerne les services de l'État qui attendent de cette épreuve expérimentale des indicateurs permettant de normer des autorisations de rejets ; une définition " déterritorialisée " pour les entreprises qui attendent de l'expérimentation qu'elle confirme les vertus de traitement de leur système, quitte à en adapter leur design ; enfin, du côté des collectivités, une définition de la qualité et des preuves de l'efficacité des dispositifs de traitement qui s'inscrivent dans le cadre de processus d'aménagement complexes sur lesquels ils n'ont que peu de prises. Les défis majeurs posés à ces collectivités par la qualité des eaux pluviales ne sont pas tant, ou pas seulement, liés à la mise au point de dispositifs techniques en tant que tels, mais plutôt à la reconfiguration des pratiques de travail et des savoirs préexistants. Pour répondre à la grande question de la qualité, il faudrait pouvoir imaginer un dispositif organisationnel, qui dès les premières esquisses du dispositif, soit capable d'intégrer des ingénieurs et des chercheurs, des hydrologues et des paysagistes, des assainisseurs et des jardiniers, des agents de la voirie et des agents de la propreté urbaine. Seules de telles associations permettent l'élaboration collective et " située " d'une connaissance qui " active les capacités " des individus dans les organisations, leur permet d'accomplir des tâches auxquelles ils attribuent du sens et de la valeur.
Auteurs du document :
DEROUBAIX J.F., DE GOUVELLO B., BRUZZONE S., LEESU, CSTB
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